Pour parler du secret de confession, nous avons interviewé Jean-Pierre Lorette qui est vicaire épiscopal du diocèse de Tournai. Le vicaire épiscopal est un membre du clergé désigné librement par l'évêque pour le seconder dans certaines tâches.
Nous pouvons remarquer que les prêtres sont soumis à deux types de secret. Ces deux secrets sont différents et en connaitre la différence est important. Le premier secret auquel un prêtre est soumis, est le secret professionnel propre à toute personne qui, dans le cadre professionnel, se voit confié par quelqu’un des informations concernant sa vie privée ou personnelle. Celui-ci est reconnu par la justice Belge, le deuxième cependant qui est lié au sacrement de la religion plus communément appelé « secret de confession » n’est reconnu que par le droit canonique. Celui-ci dit que : « le secret sacramentel est inviolable ». Si vous désirez plus de précision, référez-vous à la question 2 de l’interview ci-dessous.
Comme évoqué précédemment, bien connaître la différence entre ces deux secrets est important comme expliqué à la question 4 où le cas d'un prêtre accusé de non-assistance à personne en danger est évoqué.
Il est intéressant de pointer une des différences entre ces deux secrets, le contexte dans lequel on peut le briser. Le code pénal Belge prévoit un « droit à communiquer » là ou le secret de confession est inviolable. Si un membre de l’église le brise, il sera excommunié et devra demander de lever ce bannissement. Un exemple est décrit à la question 4.
Puis, nous avons posé des questions comme dans le sondage par rapport aux assistant vocaux. Il nous dit ne pas avoir d’assistant vocal mais bien un smartphone comme la majorité des gens qui ont répondu à notre sondage. Le fait de lui poser cette question, l’a justement fait réfléchir aux problèmes de confidentialité que cela implique et au fait qu’il serait intéressant, pendant une confession, que les protagonistes coupent leur téléphone.
"Un prêtre catholique est soumis à deux catégories de secret professionnel :
1) Une première catégorie propre à toute personne qui, dans le cadre professionnel, se voit confier par quelqu’un des informations concernant sa vie privée ou personnelle. Une des fonctions d’un prêtre est d’être un confident et un conseiller spirituel pour des personnes qui veulent lui confier des soucis, des questions, des secrets. Cette catégorie de secret professionnel est semblable à celui auquel sont tenus toutes les catégories professionnelles qui consistent à accompagner et conseiller des personnes (santé physique ou mentale, affaires personnelles, etc…).
2) Une deuxième catégorie est propre au prêtre catholique et est liée au sacrement de la confession. Par sacrement de la confession, on doit comprendre ce moment de prière explicitement demandé par une personne qui vient rencontrer un prêtre, pour, dans le cadre de la rencontre avec ce prêtre, avouer devant Dieu son péché et recevoir du prêtre le pardon de Dieu. Cette démarche soit inclure, de la part de la personne qui la sollicite, un vrai repentir et un souhait sincère de réparer autant que possible le mal dont on s’accuse, ou tout au moins la volonté sincère de changer de comportement. Ce que le prêtre apprend dans le cadre de cette confession fait l’objet du « secret de la confession »"
"La première catégorie fait rentrer les prêtres dans les catégories de personnes visées par l’article 458 du code pénal belge , qui punit les infractions au secret professionnel. Ce secret professionnel est aussi visé par le Code de droit canonique (la législation propre et interne à l’Eglise catholique) : le canon 220 déclare : « il n’est permis à personne de porter atteinte d’une manière illégitime à la bonne réputation d’autrui, ni de violer le droit de quiconque à préserver son intimité » ; le canon 1390 §2 déclare : « Qui fait au Supérieur ecclésiastique une autre dénonciation calomnieuse ou porte atteinte autrement à la bonne réputation d’autrui, peut être puni d’une juste peine, y compris la censure ».
La deuxième catégorie n’est pas prise en considération par le droit pénal belge, mais est protégée uniquement par le droit canonique : les canons 983 et 984 déclarent : « Can. 983 - § 1. Le secret sacramentel est inviolable; c'est pourquoi il est absolument interdit au confesseur de trahir en quoi que ce soit un pénitent, par des paroles ou d'une autre manière, et pour quelque cause que ce soit. § 2. À l'obligation de garder le secret sont également tenus l'interprète, s'il y en a un, et aussi tous ceux qui, d'une façon ou d'une autre, ont eu, par la confession, connaissance des péchés. Can. 984 - § 1. L'utilisation des connaissances acquises en confession qui porte préjudice au pénitent est absolument défendue au confesseur, même si tout risque d'indiscrétion est exclu. § 2. Celui qui est constitué en autorité ne peut en aucune manière utiliser pour le gouvernement extérieur la connaissance de péchés acquise par une confession, à quelque moment qu'il l'ait entendue. » Et le canon 1388 prévoit la peine suivante : « Can. 1388 - § 1. Le confesseur qui viole directement le secret sacramentel encourt l'excommunication latae sententiae réservée au Siège Apostolique; celui qui le viole d'une manière seulement indirecte sera puni selon la gravité du délit. § 2. L'interprète et les autres personnes dont il s'agit au can. 983, § 2, qui violent le secret, seront punis d'une juste peine, y compris l'excommunication ». NB : ‘excommunication latae sententiae’ veut dire : interdiction immédiate et automatique (avant même qu’un jugement soit porté par un tribunal d’Eglise) de recevoir les sacrements, de les donner, et d’exercer une quelconque fonction dans l’Eglise."
"Personnellement, je n’ai jamais été moi-même impliqué dans une affaire judiciaire où le secret professionnel aurait été concerné.
Mais récemment (décembre 2018) a eu lieu à Bruges le procès d’un prêtre accusé de non-assistance à personne en danger pour ne pas avoir alerté les proches d’une personne qui s’était confiée à lui par téléphone en lui disant qu’elle avait l’intention de se suicider –cette personne étant passée à l’acte par la suite. Les proches ont déposé plainte, et le prêtre a été condamné à un mois de prison avec sursis et 1 € de dommages et intérêts pour négligence coupable. Cette affaire a poussé les Evêques de Belgique à publier une note destinée à tous les acteurs de l’Eglise catholique, et reprécisant bien les distinctions entre secret professionnel et secret de la confession."
"Pour la première catégorie de secret professionnel, je n’hésiterais pas à communiquer à qui de droit des informations visant à protéger des personnes en danger. Ce « droit à communiquer » est autorisé par l’article 458bis du Code pénal belge, et depuis plusieurs années déjà les Evêques de Belgique encouragent vivement à user de ce droit qui est aussi une obligation morale- lorsque des membres de l’Eglise sont informés d’abus sexuels à l’égard de mineurs.
Pour le secret de la confession : il est inviolable, absolument. Par respect pour la personne qui se confesse, et par respect pour le sacrement lui-même, qui est une action de Dieu et non d’un homme.
Le seul cas où je me sentirais sérieusement interpellé par rapport à ce secret serait le cas de figure où une personne viendrait se confesser d’abuser (actuellement) de personnes mineures ou fragiles psychiquement ; il est certain qu’en ce cas, je refuserais de lui donner l’absolution (le pardon de Dieu) tant qu’elle ne prend pas elle-même des mesures très concrètes pour arrêter cet abus. Je crois -à titre ici purement personnel- qu’au cas où cette personne ne changerait rien de son comportement, je me sentirais moralement contraint de trahir le secret de la confession en vue de protéger la potentielle victime, quitte à me faire excommunier automatiquement ; je contacterais ensuite l’Organe prévu à Rome (le Tribunal de la Pénitencerie apostolique) pour expliquer ma situation et demander que le pape lève l’excommunication dont je fais l’objet. Mais il faut reconnaître que ce cas de figure est plutôt théorique : les pédophiles ne viennent jamais se confesser de leurs actes pédophiles, parce qu’ils ne sont pas conscients de la gravité de ce qu’ils commettent ! Cas de figure plus plausible : une personne, dans le cadre de la confession, révèle au prêtre qu’elle est abusée sexuellement… Là, il s’agit d’aider la victime à se tourner elle-même vers les lieux où elles peut être aidée et protégée…"
"Un assistant vocal peut être utile pour des services purement techniques (orienter vers telle personne ou service, par exemple). Mais pas du tout dans le cadre d’un accompagnement personnel et personnalisé d’une personne qui souhaite se confier et avoir une conversation profonde."
"Non."
"Oui.
J’avoue n’avoir jamais réfléchi aux garanties de protection et de confidentialité liées aux conversations que je pourrais avoir dans la première catégorie du secret professionnel auquel je suis lié. Je me suis toujours dit que je n’étais pas une personne intéressante au point d’être mise sur écoute ou espionnée !
La confession est interdite par téléphone ou par communication via internet. Le prêtre et la personne qui se confessent doivent être présents physiquement au même endroit pour vivre le sacrement. Il peut être utile que le prêtre et la personne qui vient se confesser coupent leur gsm !"