Le 9 mai 2023, la séance de cours de « Questions d’éthique en IA et en NTIC » a été consacrée à une série de débats entre les étudiants de l’auditoire sur les différents sujets traités dans le cadre du cours. Cette partie résumera le débat relatif au sujet de la surveillance et de la collecte de données grâce aux appareils connectés.
Durant le débat, la première question que les étudiants se sont posée était de savoir quels étaient les risques et les bienfaits de la surveillance des appareils connectés. Certains pensaient que les entreprises pouvaient utiliser les données collectées pour augmenter leurs profits. D’autres étaient d’avis que ces données intéressaient plutôt les institutions étatiques, telles que les services secrets, la police ou la justice, pour résoudre des cas judiciaires ou améliorer la sécurité des citoyens.
Au-delà de qui surveille, la question essentielle est de savoir si la plupart des gens sont d’accord à l’idée d’être surveillés. Pour la majorité des étudiants, la première réponse donnée est négative. Néanmoins, certaines nuances ont été apportées, notamment avec la notion de proximité de la diffusion. Dans le cas de vidéos ou d’images prises d’un individu, si les données collectées sont diffusées dans son environnement proche, il semble que cela est plus mal perçu par certains que si elles étaient diffusées à l’autre bout du monde. Ceux qui sont opposés à cette vision énonce le risque qu’on puisse sortir les données de leur contexte. D’autres personnes pourraient alors juger des propos ou des actes a posteriori, et l’individu pourrait subir des conséquences négatives d’une action qui ne l’était pas dans le contexte, ou qui l’était, mais dont personne n’aurait été au courant sans surveillance. Ce à quoi certains ont répondu que si un délit était commis, ce n’était pas la faute de la surveillance, mais bien de l’individu qui l’a commis, la surveillance ne permettant simplement que de savoir qu’un délit avait été commis. Ici, les étudiants s’inquiètent donc plutôt des conséquences de la surveillance, et abordent la question avec une approche conséquentialiste.
Ensuite, cette peur de voir ses données diffusées est aussi vue par certains comme une preuve que l’individu a quelque chose à se reprocher. Si ce n’était pas le cas, il n’aurait aucune crainte que ses données soient collectées. Les détracteurs de cette réflexion arguent qu’il n’est pas nécessaire d’avoir quelque chose à se reprocher pour ne pas désirer que des informations qui les concernent soient rendues publiques, cela peut juste être inhérent au respect de sa propre vie privée. Néanmoins, dans une optique de sécurité et de contrôle de la population, la surveillance peut permettre de dissuader des individus aux mauvaises intentions de passer à l’acte, ou du moins de compliquer leur passage à l’acte. Cela soulève d’autres questions, notamment l’efficacité de la surveillance sur la criminalité. Pour revenir à l’exemple des caméras, une personne mal intentionnée aura sans doute tendance à préparer son délit pour éviter de le perpétrer dans une zone sous vidéo-surveillance, ou se prémunira de prendre son téléphone pour éviter qu’on puisse le tracer. De l’autre côté, on peut se demander quel est l’impact sur l’état psychologique de la population. Ici, les étudiants le pressentent plutôt négatif, notamment à cause du sentiment constant d’être surveillé et de devoir se censurer.
Pour finir, sur la question de l’éthique de la surveillance, les étudiants pensent que la réponse dépend principalement de la connaissance des gens sur le sujet. Même si on pourrait être tenté de dire que si on donne son accord, on valide la politique de surveillance ou de collecte de données des entreprises ou de l’état, ce n’est pas si simple en pratique. En effet, dans certains cas, comme celui des applications mobiles par exemple, il est impossible d’avoir accès au service si on n’accepte pas sa politique générale de confidentialité et de gestion des données, ce qui force l’utilisateur à l’autoriser dans sa totalité s’il veut utiliser l’application. L’accord et la connaissance des gens sont donc de toute façon court-circuités, ce qui est un problème majeur. Pour les étudiants, l’éthique de la surveillance dépend également de l’utilisation qui est faite des données. Si celles-ci sont utilisées pour améliorer les conditions de vie de la population, en relevant les paramètres vitaux des individus pour prévenir les problèmes de santé, mais sans qu’elles soient associées à l’individu directement, alors la surveillance peut être éthique. Mais si l’objectif est purement commercial et à but lucratif pour les entreprises, alors cela ne peut pas être cautionné.