Ethique des conséquences


Généralités

Le conséquentialisme est une approche morale qui évalue la moralité d’une action en fonction de ses conséquences réelles dans un cadre où la fin recherchée est le seul idéal et il n’existe aucun idéal ni absolu ni autre tout simplement. Il s’agit en effet d’une approche très semblable à « la fin justifie les moyens » exprimée dans l’œuvre « Le prince » de Nicolas Machiavel. Ce type d’éthique semble être pertinent pour traiter du sujet de la surveillance, puisqu’il induira une étude des conséquences sur la vie des individus espionnés, mais également sur les individus qui espionnent. Tous ont probablement quelque chose à perdre à ou à gagner, et c’est pourquoi il est intéressant d’étudier les conséquences d’une telle action.

Analyse

Dans un premier temps, il est nécessaire de déterminer les parties prenantes qui sont concernées par la surveillance des appareils connectés et la collecte de données. D’un côté, on retrouve les individus (particuliers ou professionnels), entreprises, États, dont les données sont collectées. De l’autre côté, on retrouve les personnes ou les entités qui surveillent et collectent les données. De la même manière, il y a les entreprises (service marketing, …), les États et les individus. Durant cette analyse éthique des conséquences, deux scénarios sont possibles, soit on surveille les appareils connectés, soit on ne les surveille pas.

Afin d’avoir une méthodologie pour répondre à notre question suivant l’éthique des conséquences, la procédure de Bentham sera suivie. Dans celle-ci, on part du principe que les actions ne sont guidées que par l’objectif que l’action induise le plus de conséquences positives possibles pour le moins de conséquences négatives possibles, et ce pour tous les êtres vivants. Si les appareils connectés sont surveillés et les données sont collectées, il y a différentes conséquences qui peuvent se produire pour l’entité espionnée (EEé) et l’entité qui l’espionne (EE). Ci-dessous, on attribuera, suivant la méthode de Bentham, +1 point pour les conséquences positives et -1 point pour les conséquences négatives :

· Perte du contrôle de sa vie privée (EEé) : -1 point
· Sentiment d’être espionné / Mal-être, changement dans son comportement : -1 point
· Risque de divulgation de ses informations à des personnes tierces (EEé) : -1 point
· Meilleure connaissance de ses clients (EE) : +1 point
· Meilleur contrôle de sa population (EE) : +1 point
· Possibilité de mettre en place des mesures préventives pour anticiper et limiter les crimes (EE) : +1 point
· Risque d’espionnage industriel : -1 point
· Renforcement de la sécurité (EEé) : +1 point
· Acquisition de données personnelles (EE) : +1 point
· Perte de données personnelles (EEé) : -1 point
· Possibilité d’orienter la publicité et les offres pour vendre plus de produits (EE) : +1 point
· Possibilité d’avoir une publicité répondant à ses besoins (EEé) : +1 point
· Établissement du profil médical d’une personne permettant d’évaluer ses risques de tomber malade, etc. (EE) : +1 point


Conclusion

Bien qu’il semble de prime abord que le bilan de Bentham soit largement positif (+3 points) lorsque l’on considère ces différentes conséquences, le résultat reste à nuancer. En effet, dans un premier temps, on pourrait croire qu’il est sans équivoque que la surveillance est l’action qui présente le plus de conséquences positives. Néanmoins, le bilan de Bentham n’utilise pas de facteurs de pondération, ce qui semble être incohérent dans le cas auquel on s’intéresse, puisqu’on a l’impression intuitivement que plus de personnes vont être touchées par des conséquences négatives que ne le seront des entités par des conséquences positives. Un autre point qui pourrait prêter à débat est l’importance des conséquences les unes par rapport aux autres. John Stuart Mill avait introduit les notions de plaisirs inférieurs, plaisirs supérieurs et de recherche de la vertu. Néanmoins, cette classification est dépendante de chaque personne qui se penche sur la question éthique traitée, et il n’est dès lors pas possible d’établir rigoureusement un classement des conséquences présentées ici. Bien qu’il soit tout à fait pertinent de traiter ce débat sous l’angle du conséquentialisme, il n’est pas pour autant si simple de trancher la question avec les outils qu’il propose. Loin d’être toute noire ou toute blanche, cette question semble encore une fois teintée d’énormément de valeurs de gris. 

À propos de nous

Notre équipe est composé de 2 doctorants, Molk Souguir et Gérôme Moroncini et ainsi que de 4 étudiants, El Yazid Laaboul, Roy Ebwelle, Ashraf Karekezi et Melih Taki.