Programmation neuronale
Enjeux éthiques d'une neuro-amélioration
La programmation neuronale – abréviation PN - désigne la possibilité future que la technologie puisse permettre d’entraîner le cerveau humain au même titre que nous entraînons aujourd’hui des réseaux de neurones. Un système d’intelligence artificielle serait branché à notre cerveau ou intégré à celui-ci sous forme de puce ou autre pour nous intégrer des connaissances comme apprendre à parler l’anglais, apprendre à jouer du piano, mémoriser le code pénal mais aussi peut-être nous apprendre les notions du bien et du mal, la politesse, l’humour, …
La programmation neuronale s’inscrit dans un cadre plus large de neuro-amélioration. Ce terme désigne la volonté de l’humain à améliorer son organe le plus précieux, le siège de la pensée, des décisions et des comportements via le développement des neurosciences et des neuro-technologies.
Cette technologie au sens où nous l’avons définie pourrait bien révolutionner les systèmes d’enseignement et la façon de construire nos apprentissages. Le goût d’apprendre, la motivation et le sens de l’effort auraient-ils encore un sens face à cette technologie ? Qu’en est-il des questions concernant le contrôle de la puce et les possibilités de prise de contrôle de celle-ci ? Qui aurait accès à cette technologie ? Les plus riches ? Les européens ? Et qu’en est-il des interactions sociales que nous développons lors de nos phases d’apprentissage ? Risquons-nous de devenir des êtres humains n’ayant plus besoin de communiquer étant donné que nous avons les mêmes savoirs, ni de débattre puisque nous pensons de la même façon ? Ce conformisme potentiel ne serait-il pas un risque à prendre quand on imagine que la programmation neuronale pourrait être utilisée sur des personnes souffrant de handicaps mentaux ou de grosses difficultés d’apprentissage ? Et que penser de la crise que nous vivons ? Ne pourrions-nous pas utiliser la PN pour rassembler au sein de plusieurs cerveaux un ensemble de connaissances éparpillées, le tout menant rapidement à un vaccin contre le Covid-19 et des médicaments efficaces pour le traiter ?
De façon générale, la neuro-amélioration de l’Homme pose des questions éthiques. Louée par le mouvement transhumaniste et déplorée par les bio-conservateurs, l’amélioration de notre cerveau fait chaque année l’objet de plus en plus de recherches. Nous avons peu à peu une meilleure compréhension de cet être mystérieux que nous abritons dans notre crâne et un aperçu de ses fabuleuses possibilités qu’il est plus ou moins aisé de « booster ».
Pour tenter d’amener des pistes de réponses aux questions que soulève la PN nous avons mené une enquête sous trois formes. Nous avons d’abord cherché dans la littérature scientifique pour voir où en était le sujet. Ensuite, nous avons interrogé à la fois des experts et le grand public pour mieux comprendre les enjeux éthiques et les inquiétudes que cette technologie suscitait. Face à la difficulté de trouver des experts scientifiques dans ce domaine, nous avons opté pour un point de vue plus philosophique et la vision éclairée d’une doctorante en Sciences de l’Education. Nous avons enfin analysé le sujet au travers de trois éthiques : le déontologisme, l’éthique des vertus et le conséquentialisme. La question éthique à laquelle nous avons tenté de répondre est : « Devrions-nous accepter l’utilisation de la programmation neuronale comme un outil d’apprentissage menant à un Homme neuro-amélioré ou la refuser pour préserver l’Homme tel que nous le connaissons aujourd’hui, gardant inviolé, comme un sanctuaire sacré, son organe le plus précieux ? »
L’urgence d’une telle analyse éthique était présente tout au long de notre projet car cette technologie, que nous avions envisagée au début comme hypothétique et futuriste, est bien plus à nos portes que nous ne le pensions. En effet, des prototypes permettant de relier le cerveau à un dispositif formé d’électrodes directement implémentées en son sein ont déjà vu le jour avec des essais sur humains prévus en 2020.