Sondage

 Nous avons effectué un sondage afin d'obtenir un avis plus général sur notre sujet. Il s’agissait de la solution la plus simple pour obtenir le plus de réponses possibles. Grâce à ce sondage, plus de 180 personnes ont pu répondre à nos questions sur le thème de l’immersion totale et donner leur avis.
 Un des premiers points que nous avons remarqué sur le groupe interrogé est la tranche d'âge: presque deux tiers d’entre eux ont entre 18 et 24 ans et sont donc pour la plupart des étudiants. On remarque cependant que le groupe est plutôt équilibré au niveau du genre.

 En dehors des étudiants, les domaines professionnels sont assez variés, allant de l'informaticien au chauffeur de taxis.

 Afin de voir les connaissances qu’avaient les différents participants au sondage, nous leur avons d’abord demandé s'il se sentaient familier avec les termes d’immersion totale et partielle. Il s’est avéré que moins de 50% des participants étaient familiers avec le terme d’immersion totale, et environ 40% pour l’immersion partielle. Le fait que l’immersion partielle soit “moins connue” que l’immersion totale n’est pas forcément étonnant, on parle en général uniquement d’immersion plutôt que d’immersion partielle. Nous utilisons ici le terme immersion partielle afin de le distinguer facilement du terme immersion totale.

 Nous leur avons ensuite demandé s’ils avaient déjà vécu une expérience d’immersion partielle. Nous leur avions proposé les casques de réalité virtuelle et le cinéma 3D ou 4D. Nous leur avons ensuite demandé leur ressenti par rapport à ces expériences. Bien qu’elles leur aient offerts un bon ressentit, elles n’ont pas suscité une grande envie de se renseigner.

Casque VR

Cinéma 3D et 4D

 Nos questions se sont ensuite plus dirigées vers leurs avis et leurs craintes sur l’immersion partielle. Nous remarquons déjà qu'elle ne suscite que peu de craintes. Elle n’est considérée ni comme dangereuse ni comme un outil d’espionnage. Nous remarquons cependant une faible crainte au niveau de l’addiction, mais rien de significatif

 Pour finir, nous leur avons proposés différents domaines en leur demandant si le développement de technologie d’immersion partielle dans le secteur pourrait avoir un intérêt. En ce qui concerne les domaines exposés précédemment (jeu vidéo, médecine et formation), on remarque que la plupart des participants trouvent un intérêt plus ou moins élevé dans chacun des domaines proposés. Leur avis était cependant plus mitigé en ce qui concerne les “vies parallèles” (ou Second Life, correspondant à un ‘jeu’ social ayant pour but de vivre au sein du monde, et donc de créer des objets, avoir une maison et des interactions sociales). Il est même plutôt équilibré dans le cas d’une vie parallèle pour une personne ne possédant aucun handicap ni aucune introversion.

 Les questions sur l’immersion partielle servaient avant tout de voir leurs avis sur un technologie existante qui est assez proche de l’immersion totale. Nous avons ensuite posé pratiquement les mêmes questions sur l’immersion totale, afin de voir les changements dans les avis des participants.
 Un premier point notable est que, là où 93% des participants souhaitaient essayer l’immersion partielle, seul 75% essayeraient l’immersion totale. On ressent dès le début une crainte plus élevé vis-à-vis de l’immersion totale, et cela avant même d’aborder des questions plus ciblées.

 Cette crainte se confirme quand on leur demande ce qu’ils pensent des dangers de l’immersion totale. A part un avis assez mitigé sur l’espionnage, nous voyons que beaucoup de participants pensent que l’immersion totale pourrait être dangereuse et addictive.
 Dans le cas de l’addiction, plus de la moitié des participant sont d’accord sur le fait que l’immersion totale puisse être addictive, et moins de 10% pensent qu’elle ne le serait pas. Nous pourrions expliquer cela par la présence importante de l’addiction dans le domaine des jeux vidéo, et la proximité entre les technologies d’immersion et les jeux. Cependant, cela n’explique pas la différence d’opinion entre l’immersion totale et partielle. Elle s’explique certainement par le coté réaliste de l’immersion totale, qui n’offre aucune distinction avec la réalité, contrairement à l’immersion partielle.

 Pour finir, comme pour l’immersion partielle, nous leur avons posé des questions sur l’utilité que pourrait avoir l’immersion totale. Nous remarquons déjà que la plupart sont d’accord pour dire qu’elle serait utile dans les domaines d’apprentissage, du médical et du jeux vidéo. L’intérêt dans le sport suscite un peu plus de désaccord, mais reste cependant une option approuvée.

 C’est surtout dans l’utilité pour une vie parallèle (ou Second Life) où nous pouvons faire des conclusions intéressantes. Nous nous rendons déjà compte que de nombreux participants sont d’accord pour donner une seconde vie à des personnes subissant un handicap physique. Leur avis semble cependant changer (bien qu’à tendance favorable) dès que la personne n'est plus victime d’un handicap. Il est alors intéressant de remarquer que les participants préfèrent laisser les vies parallèles à des personnes ne pouvant pas vivre pleinement la réalité plutôt qu’à ceux qui n’ont pas d’excuse, comme si un handicap était une raison suffisante pour pouvoir recommencer une vie dans une autre réalité.
 Le dernier point, concernant un moyen d’entamer une vie après la mort, provoque cependant beaucoup plus de désaccord. On peut d’abord y voir une raison physique: il est difficile de vivre alors que son corps n’est plus en état, et ce même si sa conscience se trouve dans une autre réalité. Il y a ensuite une raison plus morale, beaucoup de gens sont en général défavorable à se rapprocher de l’immortalité.

 Après avoir répondu au sondage, les participants étaient libres de nous laisser un commentaire. Certains n’étaient évidemment pas pertinent, mais d’autres sont suffisamment intéressant pour que nous en parlions ici. Nous les avons ici triés de ‘pour’ à ‘contre’ l’immersion totale et nous en avons raccourcis certains afin de les rendre plus simples à comprendre (en essayant de conserver au mieux le fond du commentaire).

 Ces deux premiers commentaires évoquent les utilisations et intérêts que pourraient avoir l’immersion totale. Ils proposent tous deux des idées intéressantes, notamment le deuxième qui proposerait d’utiliser l’immersion totale pour tester des activités/métiers avant de les effectuer dans la vraie vie.
 Ces deux commentaires ont surtout été ajoutés afin de mettre quelque commentaire positif sur l’immersion totale. La plupart des commentaires pertinents étant plus orienté contre l’immersion totale, nous voulions montrer qu’il ne s’agit que d’une partie des commentaires, et que d’autres personnes pensent avant tout à ses bienfaits.

 Ce commentaire indique dans un premier temps une idée que Nozick avait déjà évoqué : rester connecté à un monde virtuel revient à la mort. Ce point est des plus pertinent, il est évident que ne plus vivre dans notre monde reviendrait d’une certaine manière à mourir.
 Cette idée n’est cependant pas limitée uniquement à l’immersion totale et aux mondes virtuels. Prenons par exemple des astronautes allant coloniser Mars, étant donné qu’ils ne reviendraient pas sur Terre, ils pourraient être considérés comme “mort” de notre point de vue. Certains avancerait que ces astronautes pourraient encore interagir avec la Terre en envoyant des messages, mais il en est de même pour les personnes confinées dans un monde virtuel alternatif.
 La deuxième partie évoque l’utilisation de l’immersion dans le cadre même de notre monde (en prenant comme exemple l’appareil permettant de parler de Steven Hawking). Cette utilisation de l’immersion n’est pas incorrecte en soit, mais elle correspond plus à de la réalité augmentée qu’à de l’immersion totale. Cette technologie tient plus du transhumanisme* sujet déjà très présent en éthique.

 Il s’agit d’un problème qui semble évident quand on parle de monde virtuel. Des personnes ont des problèmes dans le monde réel, mais dans le monde virtuel, ils peuvent être ce qu’ils veulent. Certains y seront peut-être traité comme des rois, alors que dans la vraie vie ce sont des employés de bureau avec une vie monotone.
 Dans cette situation, pourquoi vouloir rentrer dans le monde réel si l’on peut juste rester dans le monde virtuel? Il s’agit déjà d’un problème présent avec les jeux vidéo, mais nous pouvons nous dire qu’il prendra encore plus d’ampleur avec le coté réaliste de l’immersion totale.
 Mais nous également pouvons nous dire qu’il ne s’agit pas forcément d’un problème! Si l’on reprend le cas des jeux vidéo, beaucoup de personnes qui avaient perdues le goût de vivre ne se sont pas suicidés ou ont récupéré un sens à leur vie en jouant au jeux vidéo. L’immersion totale offrira alors les mêmes perspectives. Et c’est toujours mieux si des personnes choisissent de fuir la réalité en se plongeant dans un monde immersif plutôt qu'en se suicidant.

 Ce commentaire n’est pas forcément contre l’immersion totale en tant que tel. Il évoque les problèmes d’isolement social qu’elle peut provoquer. Il est évident que, si l’on suppose que l’immersion totale ne sera pas limitée, cela provoquera un nombre important de personne s’y isolant.
 Il faut cependant se dire que les problèmes d’isolement social sont des problèmes propres à notre époque. Il était impensable dans les années 1800 d’être isolé de la société. L’isolement est principalement arrivé avec l’essor d’internet, des réseaux sociaux, des jeux vidéo, … Il s’agit également d’un problème culturel, on peut se dire que certaines cultures (contemporaine ou futuriste) peuvent totalement tolérer que des personnes vivent parfaitement isolées tout en ayant des interactions sociales sur divers réseaux, qu’ils s’agissent de réseaux sociaux plus classiques comme Facebook ou Discord, ou des réseaux plus futuristes comme l’immersion totale.

 Une première remarque qui ressort est le côté “contrôle” que doit subir l’immersion totale. C’est un point que nous avons évoqué mais très peu traité au final. Ça peut sembler assez étranges au final de vouloir contrôler une technologie qui serait disponible, et de limiter ses possibilités d’utilisation. Ça ressemble à une atteinte à la liberté que de ne pas permettre l’usage au plein potentiel d’un outil assez bénin.
 Il n’est cependant pas forcément illogique de limiter l’utilisation d’une technologie. Nous pouvons prendre par exemple l’utilisation d’armes qui est limité à cause de son côté “mortel”. On trouve également d’autres technologie qui se voient limitée, principalement pour des raisons éthiques, comme les expériences génétiques ou le clonage d’être vivant. L’immersion totale pourrait en effet subir des limitations similaires, dues à son coté éthique complexe.

 Ces deux commentaires sont intéressants pour leur cotés radicalement contre l’immersion totale. On remarque d’ailleurs qu’ils possèdent tous deux un argument d’éloignements de l’humain, le premier en disant que les humains se prennent pour des dieux, le second en spécifiant la fin de l’être humain.
 On pourrait y voir un certain coté poétique à vouloir à tout prix conserver ce qui fait de nous des humains, mais s’agit-il forcément d’une bonne chose ? On peut se dire que si nos ancêtres phylogénétiques avaient été aussi réticent à évoluer en homo sapiens, nous n’aurions actuellement rien de ce qui fait de nous des humains.
 Il faut évidemment nuancer ces propos, l’humanité qui se prend pour un dieu ou la suppression de la mort ne sont pas forcément des points qui peuvent être considérés comme positif. Ce sont tous deux des points complexes à traiter, et l’on peut comprendre l’aversion qu’affichent certaines personnes lorsque nous évoquons le principe de s’émanciper des lois de la nature.