Utilitarisme

L’utilitarisme est une éthique selon laquelle, l’utile est la source de toutes valeurs. Elle met en avant le fait d’agir de manière à maximiser le bien-être collectif des êtres concernés. Dans ce sens, elle considère qu’une action est bonne si ses conséquences ont une utilité pour la majorité des personnes impactées. On parle donc d’une éthique conséquentialiste.

Il est évident que la réponse à la question « L’utilisation de l’IA en justice suit elle une éthique utilitariste ? » n’est pas direct et va dépendre de différentes choses. De plus, cette analyse n’est évidemment pas absolue et est à prendre avec des pincettes étant donné que peu de tests ont été réalisés jusqu’à présent et que l’IA peut réaliser des actes qui, à priori, sont inattendus (on a l’exemple de la technologie Compas qui, sans avoir été programmée de cette manière-là, avait un jugement différent selon l’origine de l’accusé).

Imaginons pour commencer, que l’IA est seule à décider, c’est-à-dire que l’Homme n’intervient pas dans le jugement (pas de juges, pas d’avocats, …). Dans ce cas, l’utilisation de l’IA pourrait réduire considérablement les frais liés à la justice. En effet, l’Etat (et donc les contribuables) devrait uniquement payer le développement de cette technologie ainsi qu’une équipe de personne chargée de la maintenance du système. Les personnes concernées par l’affaire judiciaire n’auraient plus à engager d’avocats car l’IA se baserait uniquement sur les faits et les affaires passées. De plus, l’IA pourrait les traiter beaucoup plus rapidement que l’Homme. Pour finir, dans le cas d’une IA programmée de manière totalement neutre (ce qui est très difficile), on augmente considérablement l’impartialité du jugement (plus de problème racial, plus de problème lié à l’humeur du juge, …). Si on comptabilise le nombre de personnes pour qui cette manière de fonctionner serait utile, on a :
    - L’Etat (contribuables)
    - Les personnes employées pour la maintenance et le développement du système
    - Les personnes « gagnantes » du jugement (rapidité d’exécution, très peu de frais)
    - La population en générale dans le cas d’affaires faisant intervenir des personnes dangereuses     (la peine étant décidée plus rapidement que par la justice humaine et potentiellement avec plus     de précautions que l’Homme)
    - Les personnes accusées qui n’ont plus peur d’être jugée de manière partiale

Evidemment, on retrouve aussi des personnes qui vont être impactée négativement par la présence de l’IA en justice :
    - Les personnes exerçant (ou qui vont exercer) un métier dans le monde judiciaire (juges,     avocats, professeur, …) qui se retrouvent sans travail. On pourrait cependant imaginer que l’IA     ferait son entrée progressivement afin que les personnes qui sont dans le métier puisse     continuer jusqu’à leur retraite. Néanmoins, cela retire des possibilités de carrières pour les     jeunes.
    - L’accusé et ses proches. En effet, l’IA pourrait potentiellement prendre des mesures plus     conséquentes qu’un juge, étant donné qu’elle n’est pas sensible aux émotions.

On voit donc que l’introduction de l’IA en justice en tant que seule décisionnaire suit une éthique utilitariste car elle est utile à une majorité de la population.

Dans le cas où l’IA est une aide à la décision, le jugement final reste dans les mains de l’Homme. On ne peut donc plus faire la même conclusion que précédemment. En effet, au niveau budgétaire, la justice demandera plus d’argent que maintenant car il faudra non seulement payer les juges et avocats mais également le développement et la maintenance de la technologie. Cependant, elle pourrait accélérer les jugements en fonction de l’importance qu’elle aurait dans les décisions (plus elle a de l’importance, moins la décision devra être réfléchies par les différents acteurs judiciaires) et de ce fait, faire gagner de l’argent à l’Etat et aux différentes personnes liées au dossier. Le bénéfice d’impartialité qu’amène l’IA serait diminuer car elle n’est plus seule à décider.

Si nous regardons l’ensemble des gens pour qui l’utilisation de l’IA en tant qu’aide à la décision serait utile, nous avons :
    - Les accusés qui seront jugés de manière un peu plus impartiale (mais pas totalement) et qui     conserve l’atout émotif dans leur jugement (le juge peut être sensible à la situation tout en     étant épaulé par l’IA)
    - Les personnes exerçant un métier dans le domaine judiciaire qui conserve leur place et sont     aidées par l’IA
    - Les personnes liées à l’affaire. En effet, si elle est résolue plus rapidement, c’est du temps     gagné pour tout le monde
    - L’Etat dans le cas où l’IA accélère le traitement des affaires judiciaires

Dans l’autre camp, nous retrouvons :
    - L’accusé et ses proches. En effet, le juge pourrait devenir plus sévères à la suite des conseils     de l’IA
    - L’Etat qui doit attribuer plus d’argent au domaine judiciaire.

On voit que dans ce cas, la réponse à la question est plus nuancée étant donné que l’Etat se retrouve dans les deux côtés de l’équation. Il est donc difficile de se prononcer sans une étude approfondie des coûts que cela engendrerait et du temps que cela ferait gagner. Si le temps gagné prend le dessus sur le coût, on peut alors conclure que l’utilisation de l’IA en tant qu’aide suit une éthique utilitariste. Dans le cas contraire, la conclusion sera l’inverse.