Analyse selon l'éthique des vertus
L'éthique des vertus, aussi appelée éthique eudémoniste, dit que nos actes sont réalisés seulement s'ils ont une bonne raison d'être accomplis.
Concernant le Bodyhacking, il est important de dissocier les deux acteurs majeurs qui prennent part à l’acte. En effet, il y a le créateur (ou le chercheur) qui s’occupera de concevoir le dispositif et voir même de l’implanter, et ensuite il y a la personne qui subira cette modification physique. Ces modifications corporelles peuvent servir de nombreuses causes, comme cité par Josiah Zayner, Dr en biophysique à l’université de Chicago et chercheur pour la NASA. La modification d’ADN en vue de guérir d’une maladie mortelle, avoir des yeux d’une certaine couleur, s'implanter une puce permettant d’entendre les couleurs ou juste créer des animaux fluorescent dans la nuit sont des résultats obtenues via le bodyhacking.
Si l'on se concentre sur une personne effectuant des recherches dans le domaine, un expert du sujet, on peut comprendre que ses intentions sont globalement bonnes. En effet, prenons l’exemple de Josiah Zayner. Celui-ci parle aussi bien de la modification génétique pour pouvoir sauver des gens atteint de maladie grave que du fait de pouvoir avoir des dragons ou ressuscité des dinosaures grâce à leurs ADN. Dans tout ces exemples, on peut identifier de bonnes raisons de poser un certain acte tel que la compassion pour une personne malade. Néamoins, nous y décelons aussi de l’ambition pour réaliser le rêve de certaines personnes qui voudraient revoir les dinosaures ou connaitre les dragons. De ce fait, il y une certaine forme d’égoïsme derrière les idées du Bodyhacking. Monsieur Zayner, met en avant le fait que chaque humain devrait pouvoir décider de se modifier lui-même et donc d'acquérir les compétences qui lui semblent intéressantes pour lui-même, sans devoir s'intéresser du monde qui l'entoure. Avec des technologies comme CRISPR, qui permet la modification de l’ADN, on pourrait imaginer qu’un dirigeant choisisse pour les couples des enfants « à la carte ». Malheureusement, l’histoire (au travers des horreurs faites par Hitler) nous a déjà prouvé ce genre de « sélection » peuvent avoir des dérives.
Pour une personne recevant une modification, on peut se douter que son intention est bonne. Reprenons l’exemple de la personne qui est atteinte d’une maladie mortelle pour laquelle aucun traitement traditionnel n’existe. On peut facilement imaginer que ce n’est pas simplement de l’égoïsme que de survivre mais aussi une certaine forme d’indépendance et de modestie, car il aurait le même droit à la vie qu'un autre humain. Cependant, pour d’autres application de bodyhacking, nous pouvons nous demander si la raison est profondément bonne. En effet, prenons le cas de la personne s’étant implanté des écouteurs dans les oreilles de façon à pouvoir écouter la musique de façon discrète. On peut se dire que la personne vise un certain plaisir qu'est d’écouter la musique de façon discrète sans se renfermer ou se couper des autres car il peut suivre une discussion en même temps. Cependant, cette personne à aussi avoué qu’elle voudrait pouvoir s’équiper de petits micros directionnels afin d’entendre des discussions au loin et pouvoir « espionner » les gens. Cette deuxième ambition pose plus soucis si on tient compte de l'éthique des vertus. En effet,nous sommes ici sur une démarche ayant pour seul raison d’exister la curiosité voir même une certaine forme de paresse sociale car la personne ne devra plus échanger avec les personnes d’un groupe pour entendre leur discussion et échanger avec eux.
En conclusion, selon cette éthique, les bases du bodyhacking sont bonnes car les raisons qui poussent les différents acteurs à faire ce qu'ils font sont généralement bonnes. Cependant, il faut faire attention à une certaine forme d’égoïsme sous-jacent à tous ces projets.
Analyse selon l'éthique des devoirs
L’éthique des devoirs ou déontologisme affirme qu’une bonne action existe que si elle est requise par la loi morale. Chacune de nos actions doit être basée sur des devoirs, des principes ou des impératifs moraux.
Certaines pratiques du bodyhacking peuvent être considérées comme déontologiquement morales tandis que d’autres pas du tout.
Prenons le cas d’une personne née avec un handicap, telle que la surdité, qui décide d’avoir recours à un implant auditif afin de pouvoir entendre comme une personne sans problème. Le fait de s’implanter un objet afin d’annuler un handicap ou d’obtenir les mêmes avantages qu’une personne "normalement constituée" est parfaitement moral suivant les trois principes de l’éthique des devoirs. Dans un premier temps, le principe d’universalisation est bien respecté vu que cette action est universellement possible : tous les gens avec des problèmes peuvent les résoudres, si l’appareil le permettant existe. Cela n’entraine nullement la destruction de l’humanité et c’est bénéfique pour les êtres humains. Concernant le principe de dignité humaine, l’humain est respecté vu que chacun est maître de sa décision de s’implanter un appareil ou non ce qui implique que chacun a un « devoir de bienveillance » envers lui-même. Le dernier principe, celui de législation est lui aussi respecté vu que l’action de se faire implanter l’appareil franchi le test de la publicité : personne n’en voudra à la personne handicapée de se faire implanter un appareil si elle le décide. De plus, il contribue à la construction des institutions d’un monde idéal vu que la disparition de tout handicap est voulue par tout le monde.
Reprenons comme deuxième exemple la personne s’ayant implanté les écouteurs dans les oreilles. Nous ne sommes donc plus ici en présence d’un cas de transformation « réparatrice » du corps mais d’ajout de fonctionnalités à ce dernier. Analysons ce cas suivant la démarche déontologique. La maxime à suivre est donc ici : « N’importe qui peut faire ce qu’il veut de son corps ». Le principe d’universalisation est bien respecté pour les mêmes raisons que notre cas précédant. Il en est de même pour les deux autres principes. Modifions maintenant notre cas, comme précédemment, de tel sorte que les écouteurs implantés servent aussi à écouter à distance les pensées des autres sans qu’ils le sachent. Notre analyse éthique est totalement différente. Effectivement, nous soulignons que l’action d’espionner les gens est déontologiquement immorale au vu du non-respect des trois principes de l’éthique des devoirs. Dans un premier temps, le principe d’universalisation n’est pas respecté vu que cela va à l’encontre des intérêts fondamentaux des êtres humains. Ensuite, il ne veille pas sur l’autre comme une fin mais comme un moyen car les pensées de la personne peuvent bénéficier de façon malsaine au propriétaire de l’implant. Finalement, il ne franchit pas le test de la publicité. Il est évident que personne ne serait d’accord de se savoir surveillé par quelqu’un d’autre.
En conclusion, on remarque que l’éthique des devoirs ne s’opposent pas à l’éthique des vertus. A contrario, cette dernière est prise en compte par l’éthique des devoirs.
Analyse selon l'éthique des conséquences
L'éthique des conséquences, aussi appelée éthique utilitariste, dit que nos actes sont fait de façon à maximiser le bien-être collectif. De plus, selon cette éthique, un acte ne peut être jugé que selon ses conséquences.
Dans cette théorie éthique, les actes ne prennent pas de valeur par les raisons qui font surgir ces actions et ils ne sont pas en relations avec les événements qui se produisent. La vision conséquentialiste a pris naissance grâce à Jeremy Bentham, philosophe anglais qui affirme que le jugement d’un acte se fait en termes d’utilité en calculant le bilan des interventions qui ont amené du plaisir et celles qui ont amené de la douleur. Le jugement de ces utilités peut être tiré d’une analyse objective. Le résultat établira la nature favorable ou défavorable du plaisir. L’utilité sera donc synonyme de suprématie de la jouissance sur la peine.
Cependant, les êtres humains ne sont pas motivé que par le plaisir. Nozick se questionne à ce sujet : « Supposez qu’il existe une machine à expérience qui soit en mesure de vous faire vivre n’importe quelle expérience que vous souhaitez. Des neuropsychologues excellant dans la duperie pourraient stimuler votre cerveau de telle sorte que vous croiriez et sentiriez que vous êtes en train d’écrire un grand roman, de vous lier d’amitié, ou de lire un livre intéressant. Tout ce temps-là, vous seriez en train de flotter dans un réservoir, des électrodes fixées à votre crâne. Faudrait-il que vous branchiez cette machine à vie, établissant d’avance un programme des expériences de votre existence ? » Cette proposition est sujette à réflexion. Suivant la philosophie de Betham, si nous cherchons à maximiser notre plaisir, chacun de nous serait favorable à la question. Sauf qu’en réalité, peu de gens choisiraient cette option étant donné que l’échelle permettant de mesurer le plaisir disparaîtrait.
Le body hacking se repose beaucoup sur cette éthique. En effet, la majorité des cas qui poussent au body hacking sont issue d’une volonté d'augmenter ses propres capacités et donc d'essayer de maximiser l’utilité de son propre corps. L’objectif est donc atteint lorsque l’on trouve un plaisir et une satisfaction dérivant de ses nouvelles capacités.
Prenons le cas de Rich Lee, un body hackeur américain qui s’est soumis à une chirurgie consistant en l’implantation d’écouteurs radio. Ce dispositif permet à son utilisateur de pouvoir écouter de la musique de façon invisible. Lee affirme : « Même les idées les plus folles ont de la valeur, car elles nous mettent au défi de créer l’impossible, pour développer les moyens de notre propre transcendance. ». Dans ses mots, on voit bien que l’action de transcendance de l’humanité et la fuite de sa prison génétique augmente son bonheur. Les intentions poussant Rich à utiliser le body hacking sont en harmonie avec le principe d’utilité definie par Betham. Car en améliorant ses capacités humaines, le body hacker fuit ses limites qui dans son cas sont synonymes de souffrances. Il se sert de cette technologie pour faire pencher la balance du coté du plaisir.
Prenons maintenant le cas d’un individu handicapé qui pour des raisons quelconques doit faire face à un manque de capacités physiques standard. En ayant recours au body hacking, son but est de pouvoir bénéficier des mêmes avantages que les personnes normalement constituées. Le but premier de ses intentions sont complètement différentes de celles de Rich Lee. Même si nous sommes confronté à quelqu’un dont l’objectif est de devenir un surhumain d'un côté, et de l’autre quelqu’un qui veut compenser son handicap, dans les deux circonstances, chacune des finalités augmente la jouissance de l’individu. Le deuxième individu partage également le principe d’utilité de Betham car la douleur infligée par son handicap est remplacée par le plaisir de pouvoir profiter des mêmes capacités que les autres.