L’éthique des vertus centre la réflexion sur l’individu et sur sa façon de vivre. C’est à lui de tracer son chemin dans le but de devenir aussi vertueux qu’il est possible de l’être pour son propre bonheur. Dans ce cas, la bulle de filtrage et la prise de conscience sont deux sujets connexes sur lesquelles l’individu doit se pencher.
Mise en situation
Un individu omniscient ayant un point de vue extérieur sur l’ensemble des pratiques et dérives de
la collecte des données se pose une question : qu’implique une vie dans une bulle de filtrage ?
Un individu acceptant cette réalité personnelle n’est plus capable de différencier la Réalité de sa propre bulle personnelle. Concrètement, celui-ci se baigne dans un confort de recommandations, de conseils et d’informations qui n’oseraient pas le frustrer. Sa confiance en lui explose et la remise en question n’est plus d’actualité. Dans une telle bulle, un individu se retrouve à tout moment de sa vie conforté dans sa vision des choses. Elle n’est ni bonne ni mauvaise, c’est la sienne et il n’y a que lui qui peut la comprendre car celle-ci est définie sur mesure par rapport à son profil numérique.
Cet individu ne se transforme pas en zombie sans émotion loin de là. Il croque la vie à pleines dents, il vit, avec son entourage qui partage la même bulle ou presque, une vie d’amour, de contacts et d’intérêt pour le monde qui l’entoure.
Un jour, en aurait-il peut-être marre ? Voudra-t-il se confronter à nouveau au monde extérieur qui le faisait trembler il y a quelque temps déjà ? Il le fera avec entrain et courage. Cependant, ce n’est plus lui qui contrôle sa bulle. Ce sont des algorithmes stockés dans des serveurs à des milliers de kilomètres qui ne lui dévoileront plus rien d’autre du monde numérique.
Au chaud dans sa bulle, l’individu ne pourra en fait pas en sortir. La confiance aveugle mise dans ce système l’empêchera aujourd’hui de s’en émanciper. Depuis le début, il n’est plus que le sujet d’une vaste machinerie de contrôle. Les vertus acquises dans sa bulle, ne sont en fait qu’une image de ce que des milliers d’autres personnes auraient pu ressentir. Des clones aux émotions et vertus positives qui ne se rencontrent jamais et ne se confrontent pas.
La Réalité existe-t-elle ? Ne vivons pas tous dans notre réalité suggérée par nos expériences, nos réseaux et notre propre ressenti de ce qu’est la vie ? Sans doute qu’il y a un peu de vrai dans cette dernière question, mais la prise de conscience de ce fait devrait nous pousser à sortir la tête hors de cette bulle et peut-être nous immiscer dans celle des autres.
Le courage de se remettre en question, de croire constamment qu’il faut critiquer, analyser et savoir revenir sur ses propres opinions, c’est précisément là qu’est le réel intérêt de vivre. Nous vivons dans un écosystème hétérogène qui nous amène à interagir avec d’autres et pour améliorer, peut-être, les vertus de chacun en même temps que les nôtres.